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A moi Duc : trois mots

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Message par La Marquise de Mévigné Mar 6 Fév 2007 - 13:25

Monsieur le Duc,

Vous évoquâtes Bossuet dans une missive compromettante. Laissez-moi vous citer ce Grand homme : "Dieu tient du plus haut des cieux les rênes de tous les royaumes ; il a tous les coeurs en sa main ; tantôt il retient les passions, tantôt il leur lâche la bride, et par là il remue tout le genre humain... (Ceux qui nous gouvernent) ne sont maîtres des dispositions que les siècles passés ont mises dans les affaires, ni ils ne peuvent prévoir le cours que prendra l'avenir, loin qu'ils le puissent forcer. (Dieu) seul vous tient en sa main, qui sait le nom de ce qui n'est pas encore, qui préside à tous les temps et prévient tous les conseils."
Il y a dans cette Maison Courtoise quelque chose qui me brise le coeur et il faut se bien garder de s'abandonner à ses pensées mauvaises et aux passions de son coeur. Glissons sur tout cela et occupons-nous de la vie qui a lieu présentement.
Ceci étant dit, quelle peinture ne fîtes-vous pas pour mieux nous effrayer des si grands périls que vous entrevoyez ! Un tourbillon de mots vous a emporté hors de vous, ne serait-ce pas l'effet de quelque madère pris trop en conséquence ? Vous etes très téméraire, vous vous exposez trop avant que l'orage ne soit passé. et moi qui réclamait de vous protection et sagesse ! Ah que vous n'eussiez été, plus tôt, plus timide. Je frissonne de vos tirades qui m'emportent dans le courant d'un fleuve qui charrie tout en vrac. Vous fûtes effrayé d'une mort si proche et si peu évitable que je m'en serais trouvé plus réconfortée si cela vous eut rendu moins hasardeux. L'aventure dans laquelle vous etes engagé nous montre toutes les voies des dangers qui nous sont offerts.
A propos du Monsieur, que vous tenez absolument à faire comte, laissez-moi vous mettre en garde contre ce bretteur, qui ne rêve que d'en découdre sur quelque champs de déshonneur. Le toujours capitaine Beketchoff est une forte tête, un provocateur qui ne dit toujours pas tout pour mieux plus tard vous assommer et qui, peut-etre meme, est bien capable de dire l'inverse de ce qui rumine au fond de ses cerveaux. Il nous décrivit les comportements Du Grand homme, aujourd'hui disparu, feu le Roi Jean mais je crains qu'il ne nous est vraiment pas tout dit... La ferveur m'empêche toutefois d'aller plus loin sur le sujet, et je resterai coite devant l'adversité de la mort.
Le plus grave toutefois, et vous n'en soufflez mot, est cette intrusion en profondeur du parti des dévots dans cette Grande Maison, pourtant ouverte à tous les vents. Je crains aussi que quelqu'autre clan de la faction, toujours complottante, de Monsieur l'Autre frère du Roi ait réussi son entrée dans ce bateau un peu ivre de la liberté, en marche arrière. Il ne reste plus qu'à sévir, et la Cabale et la Franc-maçonnerie, pour que l'oeuvre du diable ne soit achevée avec toutes les promesses de tourments qui finiront bien par donner raison à ce concurrent du Créateur, ce bon messager dont nous avons trop tendance à délaisser l'authentique message.

Monsieur le Duc, souhaitant que vous retrouvassiez des chemins moins cahoteux, Je fais devant vous la plus noble des révérences, non sans vous demander d'écraser un peu moins, de votre trop grand talent, plus d'un industrieux qui aspirent à plus de simplicité.

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Message par veneur Mar 6 Fév 2007 - 20:57

En trois mots comme en un, Ser Cherge, vous allez bientot nous chanter : "tout va très bien Madame de la Marquise ! Tout va très bien !".
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Message par Nini Peau d'chien Mer 7 Fév 2007 - 11:32

Marquise,
Vous tiendriez-vous désormais à l'écart du bon Duc, que vous applaudîtes hier et dont même vous sollicitâtes la protection ? Ne l'aimeriez-vous plus ? Ou plutôt auriez-vous eu vent et peur de la riposte impitoyable, de l'effroyable et infernale machine que, dit-on, dans sa fureur, avec force grognements et rage, votre implacable Capitaine préparerait contre le Duc, et qui, en l'écrabouillant, sèmerait, tel l'Aquilon venu du fond de l'horizon, carnage et dévastation dans les chaumières alentour. Tout ne sera alors que ruines et désolation, désastre et catastrophe.
Mais Marquise, tout sera perdu, fors l'honneur ! Laissons donc. Sur les mornes humains que sa colère gronde !
Je reste, en tout état de cause, votre indigne et dévouée amie.
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Message par La Marquise de Mévigné Ven 9 Fév 2007 - 8:41

Nini Peau d'chien a écrit:Marquise,
Vous tiendriez-vous désormais à l'écart du bon Duc, que vous applaudîtes hier et dont même vous sollicitâtes la protection ? Ne l'aimeriez-vous plus ? Ou plutôt auriez-vous eu vent et peur de la riposte impitoyable, de l'effroyable et infernale machine que, dit-on, dans sa fureur, avec force grognements et rage, votre implacable Capitaine préparerait contre le Duc, et qui, en l'écrabouillant, sèmerait, tel l'Aquilon venu du fond de l'horizon, carnage et dévastation dans les chaumières alentour. Tout ne sera alors que ruines et désolation, désastre et catastrophe.
Mais Marquise, tout sera perdu, fors l'honneur ! Laissons donc. Sur les mornes humains que sa colère gronde !
Je reste, en tout état de cause, votre indigne et dévouée amie.

Ma chère Nini,

Je vous croyais le plus souvent attablée dans quelque cabaret du Palais Royal, mais à vous lire on voit bien que vous fûtes bien née.
Pour le moment rien ne fonctionne bien dans ce pays de cocagne, et les postes, et l'université. Tout est déréglé et il me vient parfois de telles aigreurs, au bout de ma plume que si je ne renvoyais pas ces tentations du diable aux fins fonds des vapeurs célestes, je mériterais bien les Petites Maisons.
Vous m'interrogeâtes au sujet du Duc. Il me délaisse, ma chère, trop occupé qu'il est à s'instruire du pays de la Courtoisie, à hurler avec les loups avant de partir en guerre contre les attributs de la tyrannie.
Car voyez-vous, chère Nini, les hommes ne rêvent que de guerroyer; ils ne pensent qu'à cela et sont malades dès que le calme se profile à l'horizon. Ces Messieurs de la Maison Courtoise sont en pleine effervescence, aux motifs de la prise de pouvoir, de plus en plus affirmée et controversée de Monsieur le Régent et du renvoi, tels des laquais, par icelui de tous ceux qui pourraient porter atteinte à sa gloire et pourraient le gêner dans la réalisation de ce qu'il croit etre sa grande oeuvre, et qui ne fait que servir quelques forces obscures de la subversion. Cela me donne des vapeurs noires et bien souvent je songe à aller me perdre en dévotions dans la petite Trappe.
Figurez-vous, ma chère, qu'au dernier bal masqué du jeu de paume , tout ce qui s'émoustillent dans les gazettes bien pensantes ou se répand en propos lénifiants et provocateurs dans les discussions des places publiques, à la mode, étaient présent ou représenté en ce meme lieu. Pour une observatrice attentive comme moi, ce fut un régal bien amère. Et l'on vit le capitaine Beketchoff, avancer à découvert, se retenir, mais sans y arriver vraiment, de cracher au nez et à la barbe de Monsieur le Grand Duc de Saint Sermon, qui n'en avait cure, et puis un représentant du comte de Mondévy se lancer dans une péroraison bien sentie, qui ne manqua pas de mettre en fureur notre Dragon de service, toujours prêt à cracher son feu dévastateur, à travers une réplique quelque peu corrosive. Mais ce qui est étonnant, ma chère, c'est le comportement, quelque peu animal, de ces "bestiaux de salon". A bien observer la nature, souvent l'étude aiguisée du comportement des bêtes sauvages est révélatrice de l'origine de celui qui se croit leur supérieur. Regardez bien le manège de nos cervidés : ils se défient de loin, se jaugent à distance en fonction de la puissance de leurs raires ; quand les forces se perçoivent comme trop inégales, le plus faible évite avec grands soins ceux qu'il estime lui etre supérieurs en force, mais si par malheur le rapport de force est indécis parce que se rapprochant de l'équilibre, alors ceux qui étaient des comparses commencent à rentrer en fureur et entament un rapprochement qui ne relève pas de la tendresse. La suite est connue : quand seulement quelques pieds les séparent, ils se toisent, se défient en poussant quelques coups de gueule puis brutalement s'affrontent et on peut entendre le bruit de leurs bois qui s'entrechoquent. L'issue de cette querelle d'allemand est souvent incertaine mais le plus souvent elle se traduit par la fuite un peu piteuse de celui des protagonistes qui se sent le plus faible ; dans de très rares cas l'un des deux est blessé à mort et s'en va agoniser aux fins fonds de quelque hallier. Mais pourquoi donc n'entend-t-on plus la fanfare assurée de celui que Monsieur le Grand Duc tend obstinément à annoblir sous le sous le titre de comte Becketchoff ?
Aux cours de ces réjouissances, j'ai cru reconnaître le Prince d'Athènes par la qualité de sa conversation, mais je n'en suis pas si sure, ceci d'autant plus qu'un mystérieux personnage, tout de blanc vêtu a fait son apparition, prétendant nettoyer les écuries d'Augias. Je fus également très étonnée de ne point déceler la présence de quelques représentants de la Maison Bleue.
Voilà ma chère tout ce que je puis vous écrire pour vous instruire des nouvelles de ce pays et je puis vous affirmer que, dans l'état où je suis ce matin, il me serait impossible de tenir un verre rempli d'eau posé sur ma tête sans en faire tomber quelques gouttes.

Ma Chère Nini, mes meilleures pensées vous accompagnent.

La Marquise de Mévigné


Post-scriptum :
Monsieur de Label Lauvret m'avait bien prévenue, dans sa dernière lettre que la guerre, au sein de la Maison Courtoise, allait etre totale. D'ailleurs je lui avait demandé de bien vouloir m'instruire à ce sujet ; ce qu'il fit dans une note, très technique et appuyée sur son expérience de veneur, dans un style très militaire, qu'il eut la bonté de me faire porter.
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Message par Nini Peau d'chien Ven 9 Fév 2007 - 12:51

Marquise, comme votre lettre me fait plaisir ! Je crois que je vais bientôt n'avoir plus d'autres amis dans cett société, que j'aime bien pourtant. Très peu d'entre eux acceptent la récréation. Il est même arrivé au Duc lui-même de chausser de gros sabots à mon égard !
Votre ami Veneur, lui, devrait être mon ami car les amis de nos amis...Figurez-vous qu'il n'admet pas la moindre pique de ma part. Pourtant, il les mérite et, à vrai dire, il devrait en être honoré ! Mais non ! Il entre aussitôt en fureur, sort son plus gros mousquet et même, le croirez-vous, menace de lâcher ses chiens contre ma faible personne.
Y comprenez-vous quelque chose?
Votre dévouée et perplexe Nini.
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Message par La Marquise de Mévigné Lun 12 Fév 2007 - 15:03

Nini Peau d'chien a écrit:Marquise, comme votre lettre me fait plaisir ! Je crois que je vais bientôt n'avoir plus d'autres amis dans cette société, que j'aime bien pourtant. Très peu d'entre eux acceptent la récréation. Il est même arrivé au Duc lui-même de chausser de gros sabots à mon égard !
Votre ami Veneur, lui, devrait être mon ami car les amis de nos amis...Figurez-vous qu'il n'admet pas la moindre pique de ma part. Pourtant, il les mérite et, à vrai dire, il devrait en être honoré ! Mais non ! Il entre aussitôt en fureur, sort son plus gros mousquet et même, le croirez-vous, menace de lâcher ses chiens contre ma faible personne.
Y comprenez-vous quelque chose?
Votre dévouée et perplexe Nini.

Ma très chère et apeurée Nini,

Toutes les mélancolies des tempéraments sont des pressentiments. Mais qu'advient-il à vos esprits sensibles ? Les voilà tout en émoi parce qu'un extravagué vous aurait menacé de son gros mousquet !
Et quoi, Madame ! Reprenez des couleurs, ne soyez pas abattue comme la Princesse Olympie ! Je connais bien le Monsieur qui vous poursuivrait de sa ire. C'est l'homme aux deux visages. Car, sachez-le, ma très chère, tous les maîtres d'équipage sont absolument insupportables sur le terrain de leurs manoeuvres canines, et éventuellement équestres. Ils deviennent alors autre personnage, animés qu'ils sont de leur désir passionnel de prise. Oui, sachez-le, ce sont de vrais Don Juan campagnards, dont l'assouvissement ne se trouve satisfait que par la brutalité des assauts qu'ils mènent avec leurs meutes, tout autant que par l'art subtil, qu'ils sont obligés de déployer, dans la recherche de leurs graals, toujours fuyants. J'ai connu un de ces Maître d'équipage, qui courrait le cochon à perdre la vie, dans les landes limousines. Il fouaillait, comme un dément, sur son passage, dans les rues des villages qu'il traversait à bride abattue, pour que ces marauds de journaliers lui laissent tout le passage. Le baron Archibald du Bonpié était un de ces personnages qui sortait du Moyen Age. Un vieux ruffian que les âges avaient rendu tout chenu et podagre. C'était un parangon de laideur avec sa silhouette simiesque. son corps villeux était couvert de cals, véritables stigmates de stupre et de débauche, dont l'épigastre laissait apparaître de superbes poignées d'amour . Une énorme bouche lippue cerclée de bacchantes seigneuriales en disait long sur sa volonté d'égaler Priape. Enfin sa face érugineuse et, écaillée par les outrages du temps, était taraudée par deux petits yeux qu'on aurait volontiers pour deux petites boules corallines.
Mais à l'issue de ces bordées furieuses, ils redeviennent très civilisés et meme agréables, déambulant avec leurs chamarures, en charmants histrions, dans les salons de leurs hôtes bienveillants. Et là ils ne sont pas les derniers à honorer les rillons en brochettes, les chapons aux girolles, les omelettes aux morilles, toutes sortes de fromages : des pers, des aubères, des mordorés, des éburnéens, des flavescents, des gorge-de-pigeon, des auburn, des grivelés, des incarnats, des purpurins, des tête-de-nègre, des ventre-de-biche, des céladon ; le tout agrémenté de quelque liquide vermeil en provenance de ces belles et délicates terres de Touraine. Et puis point n'est la fin de leurs ripailles, on peut les voir aussi gourmander toute une générosité de desserts avec les petits fours duchesse, bien dorés avec leur petite cerise confite en exergue, les galettes avec leurs gelées de framboise et de groseille, parfois amandées ou vanillées, les pets de nonne bien frits, les babas au Kirsch, les gâteaux de Savoie, les pains de Gênes, les tartes Tatin qui dévoilent sans pudibonderie aucune leurs pommes caramélisées et le brillant Savarin noyé dans sa sauce au rhum. Bien sur n'est point absent de ces agapes, ces fameux vins pétillants qui, s'il coulent trop à flots, peuvent rendre très périlleux les retours en voitures à cheval !
Mais je m'embarque un peu loin, très chère nini, il faudrait tout de meme que je m'occupasse un peu de votre commerce. Comment voulez-vous que j'opère à l'égard de Monsieur de Label Lauvray ? Et si vous voulez que je le fasse, il faudra me narrer, un peu plus dans les détails, l'objet de votre différend avec cet homme, qui vous parut si plein de courroux à votre égard ; mais je suis quand meme très intriguée : quelles furent-donc ses manigances qui vous rendirent à la fois si furieuse et si triste ? Je ne saurais rencontrer mon vieil ami qu'à l'issue de la période de ses chasses, c'est à dire au mois de mai mais je puis toutefois lui envoyer quelques poulets afin de lui plaider votre cause car rien ne me serait plus agréable que de vous rabibocher avec ce vieux grognon, qui dans le fond est loin d'etre si mauvais que vous ne le suggérer !

Il est grand temps, ma très chère Nini, de vous transmettre tous les sentiments affectueux, qu'on peut seuls se transmettre entre femmes.
Au plaisir de décacheter rapidement une de vos lettres tant spirituelles et ingénues.

La Marquise de Mévigné

Post-scriptum : j'ai oublié, ma très chère, de vous informer de ce que Monsieur du Plessis (le frère de notre tyranneau), va servir par procuration le mariage de Monsieur Frère avec la belle et douce Henriette d'Angleterre. Donc méfiez-vous des pouvoirs de ces Plessis, qui semblent malgré tout ce qu'on écrit dans les gazettes, toujours bien introduits en Cour !
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Message par Nini Peau d'chien Mar 13 Fév 2007 - 14:09

Ignoreriez-vous, chère Marquise, mon retrait du champ de bataille et ma retraite au doux nid de mon village, passant désormais mon temps à lire Ronsard sans renoncer, je le reconnais avec confusion, à recueillir dans nos gazettes les derniers développement de la guerre "courtoise". C'est là que je me fais prendre au piège car, au lieu de rester tranquille, je ne puis m'empêcher de venir agiter le chiffon devant les gros fronts qui s'y manifestent. Mais je vais vraiment partir, au moins pour quelque temps ; je vais, dans quelques jours, prendre un déguisement et essayer de pénétrer à l'intérieur des remparts que les nôtres assiègent afin de voir de mes propres yeux ce qu'il s'y passe, avec l'espoir d'y tenir quelque temps, ce qui, à ce qu'on dit, n'est pas facile, les sbires du nouveau maître étant à chaque carrefour, armés de gros ciseaux et même vous expulsant à la moindre incartade. Je pense que vous m'y reconnaîtrez si d'aventure vous lisez leurs propres gazettes. Au besoin vous ferai-je un petit signe.
Ne vous mettez plus en peine de me renseigner sur le sieur Label Lauvret, dont ce que vous m'avez narré quant à ses frasques dans les rues des villages et sa manière de se tenir à table m'a suffisamment éclairée. J'aurais préféré en connaître un peu plus sur ce mystérieux homme en blanc si solennel et si sérieux que personne ne semble connaître ici.
Ah ! Marquise, je regretterai cette compagnie ! Je m'y serai bien amusée ! Savez-vous qu'on y a même parlé la langue de Caius et celle de Pufendorf, mais c'est une tristesse pour un femme d'être instruite : si elle ne le dit pas, on la prend pour une sotte, si elle le montre, c'est un bas-bleu. Vous rirez, cependant, quand je vous dirai que, pour participer à la conversation, l'un d'eux a directement puisé 3 phrases dans les feuillets roses de ces recueils où sont alignés les mots de notre langue. J'ajoute la vanité aux traits dont vous les avez délicatement affublés dans vos lettres. Ce ne sont pourtant pas des personnages de notre Molière ; plutôt de cet Henri Monnier trop méconnu . (Oh ! Marquise, me pardonnerez-vous ce dur anachronisme. J'en fais souvent quand ma bibliothèque est proche de moi !)
Ils n'ont pas admis non plus que j'eusse pu connaître avant eux certaines pièces du dossier. "Tout faux ! Tout faux !" ont-ils crié lorsque je leur ai montré un certain point de la loi fondamentale du Royaume écrite par le Roi Jean lui-même, et qui réservait, pour le meilleur, à un tout petit nombre le droit de prendre des décisions, et que, telle la langue d'Esope, l'usurpateur a utilisé pour le pire, s'emparant ainsi du pouvoir en toute légalité, tandis qu'ils se contentaient tragiquement de recourir aux légistes et aux tribunaux. J'eusse aimé qu'ils ne perdissent pas trop de temps pour voir clair et s'engager sur d'autres voies. Mais ils parlent, ils parlent !!!
C'est sur ces trop sérieuses paroles que je vous laisse, Marquise, restant votre indéfectible quoique peu utile amie. Nini.
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